Les questions, sous leurs différentes formes orales et écrites, constituent le moyen le plus direct de contrôler l’action du Gouvernement par le Parlement. Prévues par le Règlement de l’Assemblée nationale, les questions écrites – posées par un député à un ministre – sont une prérogative individuelle des députés, et indispensable à ces derniers dans l’exercice de leur contrôle du Gouvernement, d’autant plus quand le député est non-inscrit.
Cependant cette prérogative est mise à mal depuis l’adoption de la réforme du Règlement de l’Assemblée Nationale, en novembre 2014. Le nouveau Règlement de l’Assemblée vient en effet de limiter le droit d’expression et d’action des députés pour la simple bonne raison que les questions écrites sont trop nombreuses. Le Président de l’Assemblée Nationale a décidé de limiter à cinquante- deux par an les questions écrites. La parole, l’action des députés sont bridées.
Si certains députés peuvent être tentés d’utiliser abusivement de cette prérogative, il n’en reste pas moins que trop peu de questions écrites obtiennent une réponse des Ministres interrogés. Et c’est là que le bât blesse.
Selon le droit en vigueur, les réponses doivent théoriquement être publiées dans le délai d’un mois suivant la publication de la question au Journal Officiel. Le taux de réponse a cependant sensiblement diminué, passant de 96 % sous la Xe législature (1993-1997) à 68 % depuis juin 2012. De façon récurrente, mes collègues et moi-même nous nous plaignons des délais de réponse. À la fin de la treizième législature, en 2012, plus de 22 000 questions écrites demeuraient sans réponse. Nous sommes par conséquent contraints de poser à nouveau la même question.
Par ailleurs, les députés non-inscrits ne peuvent actionner la procédure des questions signalées. Lorsque ces délais ont expiré, les présidents de groupe peuvent « signaler » – avec mention au Journal officiel – certaines des questions restées sans réponse, les ministres étant alors « tenus de répondre dans un délai de dix jours. Cependant dans les faits, le Gouvernement fait le choix de ne pas répondre aux questions posées par les députés, privant ainsi les députés de leur moyen de contrôle.
Il appartient donc au Gouvernement de s’organiser afin de répondre – dans les délais impartis – au législateur qui contrôle son action, comme le prévoit l’article 24 de la Constitution et non aux députés, représentant de la Nation de restreindre l’une de leurs prérogatives essentielles.
A bon entendeur…
L’Assemblée Nationale s’autocensure juillet 1st, 2015GB